Dans un contexte où les directions générales attendent de leur DSI qu’elles soient à la fois souveraines et moteurs de transformation… certains signaux doivent alerter.
Chez Hubadviser, nous passons nos journées dans les DSI de grands groupes industriels, de banques, ou d’ETI ambitieuses. Et partout, nous voyons les mêmes symptômes. Des signaux faibles devenus visibles. Des pratiques devenues des habitudes. Des décisions devenues des impasses.
On les appelle les Red Flags de la DSI.
Ce sont des signes qu’il faut changer quelque chose. Vite. Voici les 10 plus révélateurs. À surveiller. À traiter. À corriger.

1. Il n’y a pas de développeurs à la DSI
On croise aujourd’hui de plus en plus de DSI sans développeurs. Ou alors avec une équipe si réduite qu’elle ne peut plus porter de projets en interne. C’est un signal fort et préoccupant.
Pourquoi ? Parce que cela signifie que la DSI n’a plus de force de frappe propre. Elle dépend totalement de prestataires pour livrer, maintenir, ou innover. C’est un peu comme un pays qui s’est désindustrialisé, et qui se rend compte en temps de crise qu’il doit tout importer… même l’essentiel. (Cf. la France pendant la crise COVID.)
Avoir des développeurs, ce n’est pas seulement une question de coût ou de réactivité. C’est un sujet d’indépendance, de culture technologique, de capacité à expérimenter.
2. Il y a des dogmes concernant le Cloud
Autre red flag : les postures idéologiques sur le cloud. Deux attitudes opposées et toutes deux problématiques.
- La position anti-cloud qui consiste à rejeter en bloc toute démarche cloud. Elle repose souvent sur des a priori liés au coût, à la sécurité ou à la maîtrise. Mais cette posture rigide empêche toute forme d’agilité et d’innovation. Elle ignore que certains cas d’usage trouvent dans le cloud un levier de valeur et de rapidité d’exécution.
- À l’inverse, la doctrine Cloud Only est tout aussi risquée. Elle revient à faire du cloud une finalité… sans discernement. Or, le TCO (Total Cost of Ownership) du cloud peut s’avérer bien plus élevé sur le long terme, notamment pour des applications peu volatiles. Sans parler des enjeux de souveraineté ou d’extraterritorialité.
Le bon réflexe ? Une politique cloud hybride, qui combine intelligemment cloud public, cloud privé, et on-premise. Et surtout : raisonner en valeur métier, pas seulement en coût d’hébergement.
3. La quête effrénée de la satisfaction utilisateur
Cela peut paraître paradoxal, mais vouloir satisfaire tous les besoins du métier jusqu’aux moindres détails est parfois un piège.
La fameuse demande du type :
“Moi je veux que le bouton soit en haut à droite dans l’application.”
Cela crée plusieurs problèmes :
- Un coût élevé, surtout quand on n’a pas de développeurs internes, et qu’on dépend de prestataires externes.
- Une dette technique massive, car chaque adaptation unique rend le SI plus complexe à faire évoluer.
- Une dispersion des efforts, qui empêche la DSI de se concentrer sur les vrais sujets stratégiques.
Exemple : dans une entreprise industrielle, comment travailler sérieusement sur l’IoT ou l’optimisation énergétique si toute l’équipe passe son temps à personnaliser le logiciel de gestion ?
À trop vouloir faire plaisir, on finit par se condamner à un rôle de petit artisan IT. Sympa, réactif… mais jamais stratégique.
4. Pas de politique de Vendor Management
Posez-vous ces questions :
- Combien avez-vous de fournisseurs IT ?
- Quels sont vos 5 plus gros contrats ? Quelle est leur échéance ?
Quelle est la date de la clôture fiscale de vos plus gros fournisseurs ? Quelle est leur roadmap produit ?
Si vous ne savez pas répondre ou si vos achats ne savent pas non plus c’est un red flag.
La gestion des fournisseurs, ce n’est pas de l’intendance. C’est un levier clé de performance, de négociation, de gouvernance. Sans pilotage actif, on subit les choix technologiques et financiers.
5. Aucun PoC en vue depuis des mois
Dans certaines DSI, il ne se passe plus rien côté innovation. Aucun PoC, aucune expérimentation technologique, aucun test terrain. On est dans l’opérationnel pur, la tête dans le guidon, et on ne prend plus le temps d’explorer. C’est un signal fort d’immobilisme.
Pourtant, la DSI devrait impulser deux formes d’innovation :
- L’innovation appliquée au métier : par exemple, comment aider la Finance, le Marketing ou la Logistique à tester l’IA générative via des cas d’usage concrets. Ici, la DSI doit être support… voire moteur.
- L’innovation appliquée au SI lui-même : nouveaux paradigmes techniques (event streaming, microservices, serverless, automatisation) permettant au SI d’être plus agile, plus scalable, plus résilient.
Si aucune démarche de test n’est en cours, cela signifie qu’on passe à côté d’opportunités de performance. Innover, ce n’est pas un luxe. C’est un levier de transformation à activer et à piloter.
6. Beaucoup plus d’externes que d’internes
C’est un indicateur qu’on retrouve très fréquemment dans les grandes entreprises françaises.
Quand les prestataires deviennent majoritaires dans les équipes, ce n’est plus une DSI… c’est une plateforme de pilotage externalisée. La perte de souveraineté est totale.
Réinternaliser, ce n’est pas faire tout soi-même. C’est retrouver la maîtrise, au moins sur les compétences critiques.
7. On ne décommissionne pas d’applications
8. On ne sait pas prioriser les demandes
Un grand classique : les demandes affluent… mais aucune grille de lecture pour décider.
On finit par confondre l’urgent et l’important, le stratégique et le cosmétique, le “must-have” et le “nice-to-have”.
Pire : on priorise celui qui crie le plus fort.
Sans processus clair de priorisation, la DSI est en mode pompier. Elle perd sa capacité à arbitrer et à orienter les efforts là où ils comptent.
9. Le budget de la DSI n’est pas consolidé
C’est un tabou, mais dans beaucoup d’entreprises, le budget IT est :
- éclaté,
- illisible,
- sans lien avec la création de valeur.
Un budget IT doit raconter une histoire : combien on coûte, ce qu’on rapporte, et sur quoi on investit pour demain. Sans cela, impossible de convaincre un COMEX de soutenir une trajectoire technologique ambitieuse.
10. Le DSI est devenu un RSSI
Dernier red flag : une DSI qui ne parle que de cybersécurité.
Bien sûr, la sécurité est un enjeu fondamental. Mais si le DSI ou son COMEX ne le positionne plus que là-dessus, alors l’innovation, la transformation et les projets porteurs passent à la trappe.
Le DSI n’est pas un pare-feu humain. Il est (ou doit être) un leader de la performance et du changement.

À propos de l'auteur

Ismail a une expérience de 15 ans dans le conseil IT et digital. Il a évolué pendant près de 7 ans chez Gartner. Il a accompagné des startups innovantes dans leur stratégie de croissance, mais aussi travaillé avec des DSI de grands groupes sur leur transformation digitale. En 2021, Ismail a créé Hubadviser pour permettre aux DSI de challenger leur vision avec des experts de haut niveau.